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Quelle jeunesse pour le secteur jeune ?
La motion d’organisation de la CNJ indique que la « jeunesse est caractérisée par le fait d’être en formation ». Lors du SNJ des 28-29 septembre, nous avons proposé de supprimer cette condition qui découle selon nous d’une définition restrictive de la jeunesse.
On dit souvent que la jeunesse est la flamme de la révolution. Mais, au regard de la lutte des classes, comment définir la jeunesse ? Quelles sont ses particularités qui justifient stratégiquement l’autonomie de son organisation politique ?
Dans les grands mouvements sociaux, la jeunesse a toujours un rôle d’entraînement de l’ensemble de notre classe, d’avant-garde « spontanée » du mouvement ouvrier. Pendant les grèves historiques (juin 36, mai 68), les jeunes travailleurs et les étudiants étaient les plus nombreux et les plus combatifs. Cette jeunesse, que nous définissons à partir de son rôle politique d’entraînement, forme donc un ensemble cohérent qui ne se limite pas qu’aux jeunes en formation au lycée ou à la fac, mais englobe légitimement les jeunes salariés qui luttent dans leurs boîtes.
Cette radicalité spontanée s’appuie évidemment sur des causes matérielles, qui s’appliquent d’ailleurs aussi bien aux jeunes en formation qu’aux jeunes travailleurs, précaires ou pas. À cause de leur jeune âge, ils ont généralement moins de responsabilités familiales (ex : pas d’enfants à nourrir) et moins d’attaches matérielles (ex : pas de maison durement acquise à crédit). Pour cette même raison, ils sont en général moins imprégnés de l’ordre établi, qu’ils sont donc plus enclins à renverser. Leurs aspirations sont aussi moins émoussées par les défaites passées, d’où a priori leur plus grand enthousiasme. Enfin, tous les jeunes subissent une oppression spécifique de la part des plus âgés, ce qui alimente leur volonté d’émancipation sociale.
Chez les étudiants, cette radicalité est favorisée aussi par le fait qu’ils ne subissent pas encore l’aliénation au travail, qu’ils ont plus de temps libre, d’outils de réflexion… Chez les jeunes travailleurs, elle peut être renforcée au contraire par leur exploitation accrue (salaires plus bas, contrats plus précaires, horaires plus contraignants…) et l’idée que leur avenir reste bloqué « là, en bas ». Définir la jeunesse par l’absence de « position fixée dans le rapport de production » n’est donc pas pertinent. De plus, c’est restrictif : un jeune manutentionnaire embauché en CDI devrait-il être exclu de cette jeunesse ? En Chine, ce sont les jeunes travailleurs qui sont le fer de lance des luttes sociales. Cet été au Brésil, les jeunes qui se sont mobilisés comptaient aussi bien des étudiants que des travailleurs… et pas que des précaires !
Pour capter tout le potentiel révolutionnaire de cette couche par rapport au reste de la classe ouvrière, il faut revendiquer la formation d’une organisation autonome dans la jeunesse. Autrement, la radicalité des jeunes organisés a tendance à être bridée, par leur difficulté plus grande à penser, agir et peser dans les vieux cadres. En tant qu’avant-garde pour tout le mouvement ouvrier, cette organisation ne se contentera pas de réfléchir spécifiquement sur les jeunes (ce que pourrait faire une simple commission).
Il faut donc que les jeunes soient libres de faire leurs propres expériences, de former leurs propres cadres, par l’élaboration d’une orientation politique globale pour tout notre camp social.