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AP-HP : Non, ceci n’est pas une brocante
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://npa2009.org/idees/ap-hp-non-ceci-nest-pas-une-brocante
Les salarié-e-s en grève de l’hôpital Beaujon de Clichy ont descendu dans le hall les matelas des lits libérés par la sortie des patients. Une façon spectaculaire de montrer leur colère et d’interpeller les patients, une façon aussi de bloquer de fait les admissions non urgentes de nouveaux malades et de gripper la machine infernale de l’AP-HP, Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Le directeur général de l’AP-HP, « homme de gauche » ancien ministre de Sarkozy, annonçait début mai 2015 son intention de « renégocier les 35 heures ». En clair : réduire (sur le papier) la durée des factions journalières des personnels de quelques minutes pour pouvoir supprimer une grande partie de leurs RTT et jours de congé… et des emplois en CDD. Une mission commandée par les sommets de l’Etat.
Les personnels ont pris progressivement conscience du caractère inouï de l’attaque contre leurs conditions de travail et de vie. Comment continuer à travailler, comment trouver la force de reprendre chaque jour son poste, sans ces jours de repos, avec le sous-effectif déjà chronique, les services au bord de l’explosion, les roulements insupportables, les heures supplémentaires gratuites ?
21 mai, 28 mai, 11 juin, 18 juin, 25 juin… Autant de journées de grève et de manifestations au cours desquelles le personnel a manifesté une colère déterminée.
Alors, ces matelas, c’est tout un symbole
Le projet de la direction, c’est la logique marchande appliquée à l’hôpital. Même si l’AP-HP n’a pas d’actionnaires, son financement est le même qu’une entreprise, fondé sur la « productivité » des actes hospitaliers, avec en plus la pénalité d’une diminution des tarifs par le gouvernement lorsque le budget de la sécurité sociale est dépassé ! Les déficits des hôpitaux publics donnent ensuite le prétexte pour les fusionner voire les fermer.
C’est promouvoir la chirurgie ambulatoire ou « l’hôpital debout ». Patients, circulez au plus vite, ne chauffez pas trop longtemps les lits, voire pas du tout, l’hospitalisation publique coûte cher à l’Etat. Aides-soignantes, infirmières, brancardiers et personnels, roulez-roulez, transmettez vite vos consignes, et surtout soyez dispos et adaptez vos vies aux « pics d’activité », alternant jour et nuit, matin et après-midi, pour qu’on n’aille pas vous payer pour des temps morts… Par temps morts, il faut comprendre la communication entre les équipes qui se succèdent, l’écoute et le dialogue avec les patients et les familles. Toutes choses qui ne sont pas « tarifées à l’activité », pas « rentables ». Sa colère, une infirmière de l’hôpital Avicenne de Bobigny la résumait ainsi : « Le mouvement va au-delà des RTT. Je ne veux pas travailler dans un zoo où je passerais de chambre en chambre pour balancer des médicaments aux malades du pas de la porte ». C’est le sens même de ce travail qui est remis en cause.
L’« hôpital debout » exige de mettre les personnels sur les rotules. Avec des conséquences déjà bien connues des salarié-e-s : une aide-soignante sur trois est mise en invalidité avant la retraite, une infirmière sur cinq. Horaires décalés, travail debout, stress, charges lourdes et matelas, donc, à déplacer : ces professions détiennent le record national des fausses couches. Le salaire de la peine : 1400 euros nets pour une aide-soignante ayant dix ans d’ancienneté, 1900 pour une infirmière.
La révolte vient de loin, et c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase ! Les personnels se sont massivement soulevés contre le plan Hirsch. Qui, en cette fin juin 2015, avait commencé à reculer, mais ne s’était pas encore couché.
Ceci n’est pas une brocante : l’hôpital public n’est pas à vendre !
Correspondant-e-s AP-HP