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La Grèce et la direction du PCF

Grèce international

Lien publiée le 28 juillet 2015

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://russeurope.hypotheses.org/4155

Cynisme : idéologie de la petite bourgeoisie grecque désespérée par la guerre du Péloponnèse. (Bolshaya Sovetskaya Entsiclopediya, éditions de 1952)

La direction (CEN ou Comité Exécutif National) du PCF a produit, le 17 juillet, un document de travail à l’usage de ses cadres et militants sur les événements de Grèce. Ce document, plus et mieux que l’interview de Pierre Laurent, le secrétaire national, donne le ton de ce qu’est l’analyse politique que fait le PCF sur ses événements. Le rappel qui est fait des événements jusqu’au 5 juillet n’est pas faux, tout en passant sous silence l’existence de débats au sein de Syriza et en se refusant à prendre parti, voir simplement à décrire, les positions des uns et des autres. On baigne dans une image d’Epinal d’un Syriza uni autour de son chef. Mais, ce document retrace fidèlement les manœuvres de l’Eurogroupe et la tentative de coup d’état qui conduit au référendum du 5 juillet.

Par contre, sur la période du 5 au 13 juillet, ce document est bien plus succinct. Il ne tient pas compte de l’interview de Stathis Kouvelakis (membre de la plate-forme de gauche de Syriza) publiée le 15 juillet dans Jacobin[1], ni de la note postée sur le blog de Paul Mason, le correspondant de Channel 4 en Grèce, qui avait recueilli les confidences de Varoufakis et des autres membres de la gauche de Syriza[2], enfin, et surtout, aucune mention n’est faite de l’analyse de Yanis Varoufakis, l’ancien Ministre des finances, analyse publiée le 14 juillet sur son blog[3]. On pourrait multiplier les exemples. C’est donc un point de vue extrêmement orienté qui est donné dans ce document de travail, celui d’Alexis Tsipras. Pire, car l’on pourrait comprendre que politiquement on reprenne le point de vue de Tsipras. Le point de vue de l’opposition interne dans Syriza n’est nullement mentionné. Dans ces conditions, la description du vote de la nuit du 15 au 16 juillet est incompréhensible pour le lecteur, qui n’a pas les éléments nécessaires pour se faire une opinion. La référence à un sondage sur l’Euro, donnant 75% des grecs opposés à une sortie de l’Euro accentue le malaise, quant on sait la valeur très discutable des sondages qui, il faut le rappeler, donnaient le OUI vainqueur ou ne donnait qu’une très faible avance au NON, alors que celui-ci fut majoritaire à plus de 61%. Ici encore, on ne peut qu’aboutir à la conclusion que le document de la CEN du PCF entend présenter la position d’Alexis Tsipras comme la seule possible. Autrement dit, la CEN du PCF nous rejoue l’antienne de Margaret Thatcher « there is no alternative » (TINA).

Il n’est pas dans mon intention d’analyser la totalité de ce document. Néanmoins, les analyses économiques de ce qu’aurait entraîné le « Grexit » présentent un intérêt, en ce qu’elle viennent conforter l’idée d’une présentation extrêmement orientée, au point même d’en être malhonnête, de la situation en Grèce.

Je me concentrerai sur le paragraphe « Concernant la sortie de la Grèce de la zone euro » qui commence fin de la page 4 et début de la page 5 du document émis par le CEN.

Les conséquences immédiates d’un GREXIT

Un « Grexit » signifierait une dévaluation estimée au minimum à 40 % et donc une perte de pouvoir d’achat de 40 % et une augmentation du coût de la dette de 40 %. Cela ne peut apporter aucun gain de compétitivité dans un pays où les salaires ont déjà baissé de 25 % et où l’appareil productif n’est pas capable de répondre à un surcroît de demande.

On ne sait vraiment pas comment les rédacteurs de cette note peuvent déterminer ainsi la dépréciation probable du taux de change de la Drachme en cas de « Grexit ». Compte tenu de la dévaluation interne déjà opérée depuis 2010, et du rétablissement de la balance courante de la Grèce, une dépréciation de l’ordre de 15% à 25% apparaît bien plus probable. Rien ne vient donc appuyer cette argumentation, si ce n’est la volonté de présenter une image « cataclysmique » d’un possible Grexit. En fait la situation de la balance courante actuelle de la Grèce laisse à penser que cette dévaluation serait nettement inférieure à 40%.

Il y a ensuite une erreur grossière dans le texte. Tellement grossière que l’on peut penser qu’elle est faite à dessein, pour provoquer un mouvement de recul sur la base d’un « effet d’évidence » c’est quand il est dit qu’une dépréciation de 40% entraînerait une baisse du pouvoir d’achat de 40%. Cela équivaut à prétendre que la totalité de la consommation en biens et services de la totalité de la population est réalisée en biens importés. Ce n’est évidemment pas le cas. Si l’on excepte les 10% les plus riches de la population, dont la part de consommation de biens importés peut atteindre 70%, pour le reste de la population on sait que cela se situé à moins de 50% et pour les personnes les plus pauvres (disons pour les 50% les moins riches), on sait que la part importée se situe autour de 20% voire de 15%. Cela veut donc dire qu’une dépréciation de 40%, que l’on considère par ailleurs comme une hypothèse excessive, aboutirait à une perte de pouvoir d’achat de -28% sur les plus riches mais de -8% voire -6% sur les plus pauvres. De fait, la perte de pouvoir d’achat porterait essentiellement sur les plus riches. En réalité, une dépréciation de la devise induit un changement au sein de la population, touchant bien plus fortement les catégories sociales qui sont largement importatrices. C’est, aussi, un mécanisme de justice sociale au sein d’une population.

Deuxième erreur grossière, le passage suivant : « Cela ne peut apporter aucun gain de compétitivité dans un pays où les salaires ont déjà baissé de 25 % et où l’appareil productif n’est pas capable de répondre à un surcroît de demande ». Tout d’abord le problème est bien plus celui des élasticités croisées import/export ; passons. Mais, la question de la compétitivité de l’économie grecque implique de connaître les secteurs exportateurs. Ceci montre que les rédacteurs du document n’ont aucune idée, ou n’ont pas cherché à en avoir, de la situation sur ce point de la Grèce. En effet, les ressources de la balance courante de la Grèce incluent quatre postes importants :

  • Les recettes de l’industrie touristique (considérées comme des « exportations » du moment que des touristes non résidents viennent en Grèce). Or, il est évident, et corroboré par de nombreuses études, que l’industrie touristique bénéficierait massivement d’une dépréciation de la Drachme, en particulier en attirant des touristes hors-saison (cas des touristes britanniques et d’Europe du Nord) qui aujourd’hui vont en Croatie ou en Turquie.
  • Les recettes de la construction et de la réparation navale. On sait que c’est un des secteurs « exportateurs » de l’économie grecque. Actuellement, ce secteur est en crise à cause de la concurrence faite par la Croatie et la Turquie (qui a déprécié sa monnaie dans des proportions importantes depuis 3 ans). Un retour de chiffre d’affaires au niveau de celui de 2010 est probable avec une dépréciation de la Drachme de -25%, du fait de la qualité reconnue de ce secteur.
  • Les recettes de l’industrie grecque. L’industrie grecque est peu développée, mais elle a quelques secteurs d’excellence, secteurs qui sont très loin de travailler à pleine capacité des installations. En fait le taux d’utilisation des capacités semble se situer autour de 60-65%. Une montée vers 80% est possible en cas de dépréciation de la Drachme.
  • Les recettes de l’agriculture grecque. L’agriculture grecque est largement exportatrice, que ce soit vers les Balkans, vers les pays arabes, ou vers les pays de l’Eurozone. Ses marges d’exportation sont limitées par le cours de l’Euro dans les deux premiers cas.

On voit qu’une dépréciation de la Drachme induirait un coup de fouet important sur l’économie grecque. Par ailleurs, il serait alors possible d’accroître les investissements en proportion du PIB. Le coup de fouet se transformerait alors en une pente vertueuse, des investissements plus importants améliorants la productivité dans les secteurs exportateurs, qui pourraient accroitre leurs parts de marché. L’économie grecque renouerait avec la croissance et le chômage, qui touche aujourd’hui plus de 26% de la population diminuerait rapidement.

On voit que les auteurs du texte de la CEN n’ont pas présenté une image objective, et tout simplement honnête, des conséquences du GREXIT à leurs lecteurs.

Conséquences financières

« Cela aurait pour effet immédiat une hausse des prix importés donc plus d’austérité salariale, une dette privée plus chère, des difficultés accrues pour financer les investissements et, finalement, une soumission encore plus forte à la finance ».

En ce qui concerne la dette de la Grèce, il est clair qu’un GREXIT indurait un défaut souverain. Mais cela ne veut pas dire que la Grèce ne rembourserait rien. On sait qu’après un défaut, les créanciers et le pays endettés se mettent d’accord sur une forte dépréciation de la dette, qui peut aller jusqu’à 80% comme en Russie après le défaut de 1998. Si on admet que la dépréciation de la dette soit simplement de 66%., compte tenu d’une dépréciation de la devise de -25% cela donne :

Dette actuelle : 315 milliards d’Euros

Dette recalculée en Drachme, après dépréciation de la Drachme de -25% : 420 milliards de Drachmes

Dette après abattement de 66% : 138,6 milliards de Drachmes.

Si l’accord post-défaut inclut une perte de valeur faciale de 80% (comme dans le cas de la Russie) on aboutit à : 84 milliards de Drachmes.

Même dans le cas le moins avantageux, la dette grecque aurait été ramenée à 70% du PIB (200 milliards d’Euro = 200 milliards de Drachmes).

Quant à la hausse des prix, induite par la hausse des prix importés, une étude relayée par mon excellent confrère Alberto Bagnai (que je salue ici) montre qu’elle serait de 0,3 x montant de la dépréciation, soit de 7,5% étalés sur environ 3 ans. Ici encore, rien de catastrophique, et certainement rien de comparable avec les effets du 3ème mémorandum.

Quant à la question des investissements, je renvoie à ma note sur l’interview de Pierre Laurent, car j’ai montré qu’en réalité une dépréciation de la Drachme serait très favorable à l’investissement[4]. Une fois encore, on voit que les auteurs du document de travail de la CEN prennent des libertés inadmissibles avec la réalité, et que ceci ne peut s’expliquer que par la volonté idéologique de discréditer toute politique de sortie de l’Euro.

Conséquences à l’Europe

« Par ailleurs, un « grexit » déclencherait des assauts spéculatifs massifs pour faire sortir d’autres pays de la zone euro, à commencer par l’Italie (2.070 milliards d’euros de dette), l’Espagne (966 milliards d’euros), le Portugal (219 milliards d’euros) et, probablement, la France ensuite. On entrerait dans une course sans fin de chaque pays aux dévaluations compétitives, anti-salariales et déflationnistes renforçant encore la guerre économique pour prendre des parts de marché au détriment des partenaires européens ».

Le risque d’attaques spéculatives est réel, et il est probable qu’un GREXIT entraînerait un éclatement de la zone Euro. Mais, cet éclatement serait largement positif pour trois pays, l’Italie, la France et le Portugal. Si cet éclatement est anticipé (et pourquoi ne le serait-il pas ?), les gouvernement peuvent s’entendre sur une sortie collective, et fixer des limites à la dépréciation de leurs monnaies. En fait, cet éclatement de l’Euro ne pénalisera qu’un seul pays : l’Allemagne, qui verra sont excédent commercial se réduire très rapidement. Tout cela a été calculé de nombreuses fois et ces calculs ont montré que les conséquences d’un éclatement de l’Euro ne seraient, là non plus, pas « apocalyptique » comme l’écrivent les rédacteurs du document de la CEN. Ici, on voit bien l’idéologie européiste en action qui prétend que, hors de l’Euro, point de salut. Ce qui revient à dire que l’on est dans l’idéologie, et nul part ailleurs.

Un discours essentiellement idéologique

On voit la nature profonde du document de la CEN dans l’extrait suivant : « Mais le grexit serait la meilleure façon de légitimer le discours nationaliste de l’extrême droite (Aube dorée en Grèce, FN en France…) ». Autrement dit, si Mme Marine le Pen dit qu’il fait soleil à Athènes en plein midi, nous devrions tous nous précipiter sur nos manteaux et nos parapluies et crier qu’il pleut et qu’il fait froid à Athènes. Tel est le niveau de raisonnement ou est tombé le Comité Exécutif National du PCF dans son document de travail. Cela en dit long sur la terreur qui semble avoir saisi ses rédacteurs, mais aussi très long sur jusqu’où les membres de la CEN sont prêt à aller pour induire les cadres et les militants de leur parti à emprunter une voie sans issue. Car, il faut le redire encore et encore, un GREXIT n’est nullement la propriété d’un parti mais une solution économique et politique, qui doit être traitée d’un point de vue économique et politique, et non idéologique.

Le Comité Exécutif National du PCF a donc commis un document qui est largement idéologique. Il en dit long sur le désarroi de la direction du PCF (ou d’une partie de celle-ci) confrontée à la réalité, une réalité qu’il n’hésite pas à tordre ou a dissimuler. Car, il y a suffisamment de personnes de valeurs au sein de ce parti pour que l’on puisse penser que ces distorsions de la réalité, et ces mensonges, ne sont pas le produit de l’ignorance mais bien celui d’une ligne politique.

Annexe

Texte du document de travail du Comité Exécutif National du PCF en date du 17 juillet

CEN 17 juillet 2015

GRECE : Document de travail du PCF

Ce texte est une première analyse, encore à chaud, de la situation. Tant sur l’analyse que sur les leçons à tirer, il faudra prendre le temps d’approfondir, avec le recul et en tenant compte des évolutions des semaines à venir. La situation reste très instable. Face à l’urgence, nous posons des questions et ouvrons des pistes pour nos luttes, avec comme ligne de mire la nécessaire élévation de notre bataille en France et en Europe.

***

La Grèce est en première ligne de la lutte des classes en Europe. Depuis la victoire de Syriza en Grèce le 25 janvier, et a fortiori à travers la dernière séquence politique des négociations dans la zone euro, a mis en lumière la violence avec laquelle une droite au service de la finance, s’appuyant sur l’extrême droite et bénéficiant du silence complice des autres, a pu piétiner la démocratie et punir un peuple, qui a osé dire non à l’austérité. Malgré le courage de Tsipras et la maturation politique qu’a permis son combat dans toute l’Europe, de lourdes questions sont posées pour les forces progressistes de nos pays, au premier rang desquels, le rôle que nous devons jouer pour élever assez haut le niveau de débat politique et de rapport de forces en Europe, pour desserrer l’étau sur le peuple grec et ne pas laisser isolé le seul gouvernement de gauche en Europe.

LE GOUVERNEMENT TSIPRAS : UNE LUTTE PERMANENTE CONTRE LE COUP D’ETAT FINANCIER ET LA DESTABILISATION POLITIQUE.

Dans une Europe dominée par le consensus libéral entre forces de droite et social-démocrates, dès le 25 janvier, jour de leur victoire électorale, le gouvernement Tsipras et Syriza sont devenus les ennemis de tous, l’expérience alternative à détruire.

25 janvier – 25 juin : 5 mois de luttes pour la sortie de l’austérité, la relance économique et l’assainissement de la vie publique grecque, sous asphyxie financière

Le 20 février, après de difficiles négociations, la Grèce signe l’accord-pont avec l’Eurogroup. Objectif : allonger le programme de financement précédent le temps de prendre les mesures urgentes et préparer un programme de financement durable à négocier en juin. Loi humanitaire, réintégration de fonctionnaires, réouverture ERT, droit du sol, lutte contre la corruption et commission vérité sur la dette : le gouvernement Tsipras inscrit sa politique à gauche. Pendant ce temps, les termes de l’accord ne sont pas respectés par les créanciers et aucun financement n’est versé. La BCE commence à multiplier les conditionnalités pour l’accès à ses financements : l’asphyxie financière a commencé dès la victoire de Syriza.

La tentative de coup d’État financier, le référendum

Le mandat donné par le peuple grec « Sortir de l’austérité, rester dans l’euro » a conduit le gouvernement Tsipras a une démarche de négociations depuis son élection. Depuis, ni le mandat, ni la démarche n’ont changé jusqu’ici. Le 25 juin, alors qu’un accord était « à portée de main », le FMI rompt les négociations du plan de financement durable en faisant une contre proposition inacceptable. Tsipras décide alors de convoquer un referendum et appelle à voter NON à la proposition des créanciers. La réponse des forces néolibérales est celle de la pression politique et financière – une stratégie de la destabilisation et de la peur – pour peser sur le referendum.

Quelques jours avant, Samaras (leader de l’opposition grecque) appelait à un gouvernement d’Union nationale et le Président de To Potami (un parti fondé par les anciens du Pasok et pro-austérité) était reçu en grandes pompes dans toutes les institutions européennes. L’eurogroup du 27 juin décide, sans le ministre grec des finances, Yanis Varoufakis, de terminer au 30 juin le programme financier en cours. Le lendemain, conséquence logique, la BCE annonçait la coupure des liquidités pour les banques grecques à la même date. Ce chantage financier a contraint le gouvernement grec à mettre en place une procédure de contrôle des capitaux et à fermer les banques, puis à faire défaut au remboursement du FMI. L’offensive médiatique et politique est coordonnée autour d’au moins deux axes : Tsipras est irresponsable, c’est lui qui a fait échouer les négociations / la question du referendum est pour ou contre la sortie de l’Euro. Le 5 juillet, le NON l’emporte avec 61 %. Tsipras est renforcé et compte toujours négocier. Il s’appuie sur le referendum pour inclure dans les négociations un rééchelonnement de la dette et un plan d’investissement pour la croissance issu du plan Juncker. Son objectif est un programme de financement durable pour stabiliser la Grèce et relancer l’économie.

2/ LE 13 JUILLET, UN TOURNANT HISTORIQUE

L’Europe est ébranlée par le tournant pris au sein de l’Eurozone ces dernières semaines.

Une méthode de « gangsters »

Le Grexit était l’option choisie par Angela Merkel et les droites dures d’Europe (ex : le gouvernement Finlandais de droite/extrême droite) dès le début et jusqu’au dernier moment. Le but déclaré des dirigeants allemands était la “suspension provisoire “, autrement dit l’expulsion de la Grèce de la zone euro, quitte à ouvrir, pour ce pays au bord de la banqueroute, une ère cauchemardesque, et d’entraîner l’Europe elle-même dans une aventure très périlleuse. Quant à la dette grecque, les dirigeants allemands ne voulaient plus en entendre parler. Ils n’entendaient pas davantage consentir de nouveaux prêts à un Etat dirigé par un gouvernement qui a osé le défier jusqu’à organiser un référendum au verdict humiliant pour ceux qui se voient comme les maîtres de l’Europe. La Banque centrale européenne devait continuer à servir d’instrument pour ce coup d’Etat financier. Tout au long du week-end ce « bloc des durs », n’a cessé de faire des propositions provocatrices, humiliantes et inacceptables pour le gouvernement Tsipras, cherchant à ce qu’il quitte la table des négociations.

Un mauvais accord signé « le couteau sous la gorge »

Les mesures imposées dans ce contexte à Athènes sont socialement inhumaines, économiquement contre-productives et politiquement scandaleuses -incluant des violations extrêmement graves de la souveraineté du pays. Le paroxysme est, à cet égard, atteint avec la création d’un “fonds pour les privatisations” : visant à gager des actifs publics d’un montant démentiel -plus d’un quart du Produit Intérieur Brut de la Grèce !- et soustrait à la maîtrise du gouvernement pour la gestion des recettes attendues. Une mesure scélérate s’il en est. Le Grexit n’est pas écarté. Il reste le choix du gouvernement allemand et l’accord ne comporte aucune garantie de déblocage des financements, au contraire, il impose de nouvelles conditionnalités.

Le choix politique d’Alexis Tsipras : signer un mauvais accord pour éviter le désastre, stopper l’asphyxie financière du pays et la mort à petit feu, empêcher le grexit et la mort subite. Il a favorisé la survie financière du pays. Il a pris ses responsabilités de Premier ministre face aux exigences extravagantes des créanciers, à la possibilité d’un effondrement immédiat du système bancaire et la sortie de l’euro et la « sortie ordonnée » de l’euro préconisée par Schaüble, et même par certains à gauche. La Grèce n’est pas sortie de l’euro, conformément au souhait de 75 % de la population. Donc, pour l’instant, l’objectif de Schaüble n’est pas atteint.Le gouvernement Tsipras est toujours en place et bénéficie d’un très large soutien dans la population grecque. Le deuxième objectif de Schaüble n’est donc pas atteint. Le texte de l’accord a été adopté au Parlement grec dans la nuit de mercredi à jeudi. Dans le groupe de Syriza, la majorité a voté pour, 32 contre dont des personnalités « phares » (Konstantopoulou, Varoufakis), 6 abstentions et une absence. Le CC de Syriza appellait à voter contre. Nous devons être très vigilants à ne pas nous immiscer dans les débats internes de Syriza.

Le vote des communistes au Parlement français

C’est principalement le contenu de cet accord qui a conduit nos députés et sénateurs à voter contre au Parlement Français. Il s’est agit également de marquer notre rejet de la brutalité de la méthode Schauble et notre mécontentement que la France ait laissé faire. C’est aussi un vote de combat, un vote en soutien au peuple grec et à Tsipras. Pierre Laurent au Sénat « Notre vote est aujourd’hui un acte de lutte et de solidarité aux côtés du peuple grec, d’Alexis Tsipras et de nos camarades de Syriza. Nous sommes solidaires de leurs choix et assumons leur difficile et courageux combat. Nous sommes à leurs côtés pour dire non à l’expulsion de la Grèce. Mais nous disons d’un même mouvement, au nom de la France, que l’accord scandaleux imposé à Bruxelles n’est pas digne de l’Europe et qu’aucun maintien dans l’euro ne le peut légitimer ».

3/ PERSPECTIVES DE COMBATS, DE REFLEXION, D’INITIATIVES POLITIQUES

Après les deux victoires du 25 janvier et du referendum, l’accord du 13 juillet est une défaite dans le combat pour imposer une solution viable et juste pour le peuple grec et les peuples européens. Mais la bataille continue. Le 13 juillet a été le paroxysme d’un aiguisement sans précédent de l’affrontement de classe en Europe. La lutte de Syriza et la résistance du gouvernement grec ont élevé le niveau d’affrontement, permis une maturation du combat et des consciences en Europe. Les 6 mois écoulés ont été une démonstration grandeur nature pour des millions d’Européens. A un peuple et un gouvernement qui refusent l’austérité, a répondu une violence inouïe du capital allemand et d’une partie des dirigeants européens. Ceux qui l’ont emporté cette fois peuvent le payer cher dans la durée, d’autant que l’accord s’avère sans issue pour le pays. Le PCF doit poursuivre le combat avec une intensité renouvelée dans ses initiatives de solidarité, mais aussi le recul nécessaire pour tirer les leçons de cette page sombre de l’histoire européenne, en dégager des perspectives de luttes.

Aider les Grecs dans l’immédiat

→ Continuer à contester sur le fond la stratégie du choc et le contenu de l’accord

  • Refuser l’austérité. Les Grecs, s’ils ont compris le dilemme auquel était confronté le gouvernement Tsipras, restent debouts contre l’austérité. Les gouvernements de la zone euro et la « troïka » n’ont pas réussi à neutraliser les effets du « non » au référendum en Grèce. En France, les sondages d’opinion montrent qu’une large majorité des Français rejettent ces politiques.
  • Argumenter sur l’inéfficacité économique. Plusieurs voix diverses s’élèvent pour dire que l’« accord » du 13 juillet, contraire à tout bon sens économique, est inapplicable.
  • « Lever la punition ». L’inqualifiable mise sous tutelle d’un pays membre de la zone euro, le fond de privatisations, la méthode autoritaire employée font débat, y compris en Allemagne, et les humiliations produisent de l’indignation très très largement dans les sociétés européennes. Même dans des cercles conservateurs, l’inquiétude grandit. Le gouvernement allemand notamment, « serait peut-être allé trop loin ». Des ruptures s’opèrent au sein du consensus libéral, il faut les utiliser.

→ Devérouiller les financements

  • Tout faire pour stopper l’asphyxie financière de la Grèce. La décision de l’Eurogroup « post-accord » a conduit la BCE à augmenter de 900 millions d’euros de l’aide d’urgence (ELA) aux banques grecques. Cela est non seulement insuffisant mais ne permet pas à la Grèce de voir venir au-delà d’une semaine. La BCE doit assurer la liquidité des banques grecques en augmentant suffisamment le plafond des liquidités d’urgence et en en diminuant le coût. Les banques grecques doivent pouvoir rouvrir pour les citoyens comme pour les PME.
  • Argumenter sur la nécessaire restructuration de la dette. La dette grecque est non viable et l’accord, par ses conséquences récessives et les nouvelles recapitalisations des banques, peut la faire exploser à nouveau. La directrice générale du FMI, C. Lagarde vient de dire qu’elle devra être nécessairement restructurée. La BCE également.
  • Agir pour que les financements de moyen terme, arrachés par la Grèce et destinés à la relance de l’économie, deviennent effectifs au plus vite. Plusieurs engagements figurent dans l’accord à la demande de la Grèce : un programme de refinancement de 82 à 85 milliards d’euros, un plan européen d’investissement pouvant aller jusqu’à 35 milliards d’euros.
  • Créer un fonds de développement pour la Grèce, adossé à la BCE, pour que la création monétaire de la BCE soit utilisée pour l’économie grecque et non pour la spéculation financière. Ce fonds pourrait servir de modèle pour la création d’un fonds de même nature destiné à tous les pays européens.
  • Débloquer les fonds structurels non utilisés, notamment pour aider la Grèce à accueillir les migrants. La République hellénique fait aujourd’hui face, avec l’Italie, à une situation humaine et sanitaire qu’elle ne peut régler seule, a fortiori dans les conditions de crise qu’elle connaît elle-même.

=> Le PCF fera signer cet été et jusqu’à la Fête de l’Humanité, une carte pétition. Les cartes pourraient être déposées dans un lieu symbolique.

Pousser la réflexion et le débat sur les solutions

Nous avons toujours rejeté les fondements libéraux de l’Union européenne. Tout, depuis Maastricht, et en particulier depuis l’éclatement de la crise financière mondiale de 2008 et son utilisation par les dirigeants européens pour accélérer le processus de libéralisation et de démembrement des modèles sociaux de nos pays, et le tournant pris par la zone euro à travers l’accord du 13 juillet, nous conforte dans ce rejet. Après ce précédent ultra-violent, nous entrons dans un nouveau cycle. Il est maintenant évident que l’Europe ne peut continuer ainsi. Une lutte s’ouvre au grand jour entre les tenants de l’ultralibéralisme, prêts à pousser encore et toujours la mise à genoux des peuples pour servir les intérêts de la bourgeoisie, les forces d’extrême droite qui cherchent à tirer profit de la crise pour rendre crédible leur projet nationaliste et xénophobe, et une troisième option, la nôtre, celle de la refondation de l’Europe pour une coopération régionale, solidaire et démocratique. L’aiguisement des contradictions sème une confusion et parfois du désarroi. Cela doit nous conduire, à moyen terme, à des approfondissements et des clarifications. Ce combat ne peut être abandonné devant l’ampleur de la tâche. Voici, basées sur les travaux de la dernière Convention Europe du PCF, quelques réflexion et pistes d’initiatives soumises au débat des communistes pour les semaines à venir.

→ Concernant la sortie de la Grèce de la zone euro :

Devant la brutalité de cet accord, certains en viennent à penser que le grexit ne serait plus qu’un moindre mal. Quoi qu’il arrive, cette hypothèse ne peut qu’être une décision souveraine du peuple grec et nous rejetons toutes les tentatives de grexit forcé imposées par un ou plusieurs gouvernements européens, ainsi que par les créanciers. La Grèce ne peut, à nouveau, être le laboratoire d’expérimentation du pire. Cette hypothèse serait à ce stade une option extrêmement dangereuse pour plusieurs raisons :

  • Economiques et sociales: Un « Grexit » signifierait une dévaluation estimée au minimum à 40 % et donc une perte de pouvoir d’achat de 40 % et une augmentation du coût de la dette de 40 %. Cela ne peut apporter aucun gain de compétitivité dans un pays où les salaires ont déjà baissé de 25 % et où l’appareil productif n’est pas capable de répondre à un surcroît de demande. Cela aurait pour effet immédiat une hausse des prix importés donc plus d’austérité salariale, une dette privée plus chère, des difficultés accrues pour financer les investissements et, finalement, une soumission encore plus forte à la finance. Par ailleurs, un « grexit » déclencherait des assauts spéculatifs massifs pour faire sortir d’autres pays de la zone euro, à commencer par l’Italie (2.070 milliards d’euros de dette), l’Espagne (966 milliards d’euros), le Portugal (219 milliards d’euros) et, probablement, la France ensuite. On entrerait dans une course sans fin de chaque pays aux dévaluations compétitives, anti-salariales et déflationnistes renforçant encore la guerre économique pour prendre des parts de marché au détriment des partenaires européens.
  • Politiques : l’humiliation et la soumission contenues dans l’accord vont déjà laisser des traces dans les esprits en Grèce et partout en Europe. Mais le grexit serait la meilleure façon de légitimer le discours nationaliste de l’extrême droite (Aube dorée en Grèce, FN en France…), qui se prépare en se frottant les mains au choc des nations, comme elle se nourrit des divisions dans nos pays.
  • Géopolitique : une déstabilisation de la Grèce, port méditerranéen aux portes du Moyen-Orient et pays d’accueil des migrants qui fuient la guerre et la famine, est un risque d’aggravation de la situation pour toute la région.
  • Stratégique: dans notre bataille européenne commune, notre position est plus forte avec un gouvernement qui mène le combat politique au sein de la zone euro. C’est la raison principale pour laquelle Schauble et Merkel souhaitent le grexit : ils ne veulent pas que puisse exister une voix alternative à leur ordo-libéralisme. C’est pour cette même raison que les forces nationalistes et xénophobes prônent le grexit : leur alternative de repli nationaliste doit être la seule alternative.

→ Concernant notre projet européen

  • La question de la refondation de l’Union européenne se pose plus que jamais

Beaucoup de propositions figurent dans le texte de la Convention Europe du PCF, d’autres – convergentes – émanent des textes du Parti de la gauche européenne et des débats du Forum européen des alternatives (une brochure est en cours de préparation). Nous pointons deux questions clés aujourd’hui.

  • Pour ceux qui, à gauche, nourrissaient encore des doutes à ce sujet : la souveraineté populaire ne compte pour rien, aux yeux du pouvoir européen actuel, dès lors que ses “règles” sont remises en cause et que ses intérêts de classe sont en jeu. La démocratie est bel et bien au coeur des ruptures à opérer avec les règles et les institutions actuelles pour qui veut s’engager dans le combat pour la refondation de la construction européenne.
  • Un débat est ouvert, notamment par la France, sur le modèle d’intégration de la zone euro. François Hollande, dans un entretien accordé au JDD, prone un nouveau saut fédéraliste pour la zone euro qui devrait constituer une « avant garde »«J’ai proposé de reprendre l’idée de Jacques Delors du gouvernement de la zone euro et d’y ajouter un budget spécifique ainsi qu’un parlement pour en assurer le contrôle démocratique ». Après le 13 juillet, nous considérons que la conclusion qu’il tire est l’exact contraire du bon sens. D’abord parce qu’elle créée une Europe à deux vitesses entre la zone euro, intégrée au plus haut niveau, et une périphérie totalement écartée des choix majeurs en matière économique. Mais surtout parce qu’elle constitue une grave fuite en avant, au moment même, où la zone euro, et l’UE entière, devraient se questionner sur leur capacité à intégrer les différences entre ses pays membres et les choix souverains des peuples. A cette vision centralisatrice, qui nous soumettrait un peu plus à la loi du plus fort, nous opposons notre conceptiond’une Europe à géométrie choisie. Toute initiative non basée sur le consentement est vouée à l’échec. Le temps doit être pris pour négocier, dans la transparence et en conformité, non pas avec les principes libéraux et la loi des marchés, mais avec les aspirations populaires et les choix souverains des pays membres. La zone euro devrai se doter d’un Fonds européen destiné au développement des services publics et de l’emploi dans les pays membres. Ce Fonds, institution financière publique, serait financé par la BCE comme l’y autorise le Traité de Lisbonne (article 123,2). Il émettrait des titres publics que la BCE achèterait avec une partie des 1.140 milliards d’euros qu’elle s’est engagée à créer, le 22 janvier dernier, pour stimuler l’économie européenne au taux de 0,05 %. Ce Fonds serait géré démocratiquement avec des critères explicites. Il pourrait être une première étape vers la réalisation de notre demande d’un Fonds européen pour le développement que réclame le Parti de la gauche européenne.

=> Une tâche clé du PCF pour les mois à venir est de préciser son projet européen, de le construire avec ses alliés de tous les pays. Nous proposons dès la rentrée une réunion de travail visant à préciser notre alternative tant sur l’usage de la monnaie unique que sur le modèle de coopération au sein de la zone euro.

 

  • La politique européenne de la France pourrait être différente

Si le Président de la République avait joué son rôle dès le début de l’affrontement entre les “institutions” et le gouvernement grec -à plus forte raison s’il avait tenu sa promesse d’agir pour “réorienter l’Europe” dès son élection en 2012- le rapport de force aurait été bien différent dans le moment crucial que nous vivons aujourd’hui. La France a joué un rôle pour empêcher le grexit. Mais il a laissé Merkel dicter la liste des cruautés et des humiliations qui caractérisent le contenu de l’accord. Alors que son action a prouvé qu’elle pesait lourd dans les processus de négociation, elle a joué les rabatteurs sur les propositions des droites dures et des créanciers.

La bataille contre l’austérité en France est une question clé. Pour créer un nouveau rapport de force en Europe, le rôle et la voix de notre pays sont essentiels. La France peut faire basculer les choses si elle s’engage elle-même dans la contestation de l’austérité. La crise grecque élargit les possibilités d’y parvenir car elle a élevé le niveau de confrontation ici aussi. Le rôle de la France n’est pas d’être collé à n’importe quel prix au couple franco-allemand mais de prendre part à un front anti-austérité en Europe.

=> Nous pouvons lier plus systématiquement nos combats anti-austérité (hopitaux, services publics, dépenses publiques, dotations aux collectivités locales) à la demande d’une sortie du pacte budgétaire et à des mesures d’allègement de la dette (conférence européenne sur la dette)

=> nous pouvons faire monter l’exigence d’initiatives de coopération de la France avec la Grèce, par exemple, pour que notre gouvernement débloque immédiatement sa contribution au plan européen d’investissement pour la Grèce et qu’une aide alimentaire (qui existe dans le cadre européen actuel) soit constituée avec les producteurs français de viande et de lait qui connaissent une crise sans précédent de débouchés et de prix.

  • Tout pays qui veut appliquer une politique de gauche devra élever le niveau du rapport de force européen.

La « crise grecque » a mis en évidence combien l’échelle européenne est une échelle pertinente de la lutte des classes, et combien elle est difficile dans le cadre du consensus libéral qui unit droite et sociale-démocratie européenne, même avec un rapport de forces qui a évolué avec l’élection d’un premier gouvernement de gauche. L’enjeu est crucial pour nous-mêmes. Nous avons collectivement marqué des points dans la crédibilité et la visibilité de la gauche européenne. Un petit pays et un gouvernement isolé ont réussi à ouvrir une brèche et occuper le débat public pendant des semaines. Mais nous avons en face de nous un système de pouvoirs prêt à nous écraser. Nous pouvons, si nos adversaires parviennent à leurs fins, sortir affaiblis, voire rayés de la carte; et l’espoir de millions d’Européens avec. Le gouvernement de Syriza reste un rempart, il n’a pas rendu les armes. Nos amis grecs nous l’ont toujours dit : la victoire du 25 janvier élève le niveau d’ambitions, de luttes et de solidarités à construire au niveau européen et dans nos pays. Nous ne pouvons pas faiblir sur la solidarité avec le peuple grec, avec Syriza et avec le gouvernement Tsirpas. La bataille ne fait que commencer et le PCF entend bien s’engager dans cette lutte, comme il a toujours su le faire. Nous avons, de part notre histoire et notre pratique du rassemblement, un rôle particulier à jouer pour l’unification des forces qui peuvent, et doivent, entrer en mouvement.

Il faut, à gauche, se poser collectivement la question : avons-nous jusqu’ici fait vivre la solidarité politique avec le peuple grec au niveau exigé par l’enjeu stratégique que représente le premier affrontement entre un pays membre de la zone euro et l’implacable coalition des tenants du système en place ? L’honnêteté doit nous conduire à répondre non à cette question et à travailler ensemble à un rehaussement qualitatif de notre engagement – aussi nécessaire pour aider le peuple grec à sortir par le haut de l’impasse actuelle qu’indispensable pour ouvrir une perspective de gauche dans notre propre pays. Il ne suffit pas qu’un gouvernement isolé décide de “désobéir à Bruxelles” pour ouvrir la voie aux ruptures fondamentales rendant possible les changements attendus. L’Union européenne n’est pas un “château de cartes” dont il suffirait de menacer de retirer une pièce pour briser la coalition impitoyable des pouvoirs en place. Refonder l’Europe est un combat de classe de haute intensité. La construction sans relâche de convergences entre forces progressistes européennes et la recherche permanente de l’éventail le plus large possible d’alliés dans différents pays pour atteindre ensemble des objectifs partiels mais rassembleurs constituent des impératifs catégoriques pour donner à un peuple et à son  gouvernement -qui en ait la volonté politique-  la force nécessaire pour changer la donne. Par-delà la Grèce, cette leçon concerne chacun de nos pays, y compris la France. Elle interpelle le “peuple de gauche” dans toute sa diversité, ainsi que chaque force politique ou sociale qui s’en réclame.

Quelques pistes

=> Rendre possible une progression des forces anti-austérité, une « contagion » dans plusieurs aures pays en appuyant de toutes nos forces nos partis et mouvements alliés dans les pays qui ont des échéances électorales (Espagne, Portugal, Irlande) et placer les régionales en France comme une étape de la percée politique nécessaire en France pour changer le rapport de force européen (avec dans nos projets régionaux, des propositions concrètes de solidarités : programmes de co-développement, politiques de solidarité, de jumelage…). Nous envisageons une rencontre politique de haut niveau de tous les partis politiques impliqués pour discuter des modalités de cette solidarité active.

=> élargir l’alliance contre l’austérité au niveau européen : Le Forum européen des alternatives que nous avons tenu à Paris les 30 et 31 mai derniers à l’initiative du PGE, a permis le dialogue et un début de construction commune entre forces politiques, mouvements sociaux, intellectuels critiques. La situation rend urgente une deuxième édition. La fête de l’Humanité devra être un temps fort de mise en évidence de la bataille européenne.

=> élargir le rassemblement en France pour la solidarité avec la Grèce. Le spectre des forces « indignées » de la mise à genoux de la Grèce est très large. L’impact, dans les esprits, de la négation du Non au referendum aura des conséquences contradictoires. Il faut que cette indignation ne tourne pas à la résignation. L’opinion publique française évolue pour le moment dans le bon sens mais nous devons être vigilants car, une fois de plus, le système médiatique est mobilisé pour faire peur, désinformer, empêcher les Français de voir ce qui les unit aux autres peuples européens. La stratégie de la division est en marche. Nous devons saisir la questions grecque pour faire le lien en permanence avec les politiques d’austérité menées en France, la dette de notre pays, le nécessaire redressement productif pour lutter contre le chômage. Ce qui n’est pas bon pour les Grecs, n’est pas bon pour les Français.

=> matérialiser nos solidarités avec la création d’une association de coopération solidaire France-Grèce : jumelages des villes communistes, tourisme social, solidarités concrètes impliquant des organismes institutionnels (en prenant soin de ne pas empiéter sur les initiatives citoyennes déjà existantes et en incitant les camarades à prendre part à celles-ci)

Notes

[1] https://www.jacobinmag.com/2015/07/tsipras-varoufakis-kouvelakis-syriza-euro-debt/

[2] http://blogs.channel4.com/paul-mason-blog/greece-crisis-austerity-deal-pointless/4197

[3] http://yanisvaroufakis.eu/2015/07/14/on-the-euro-summits-statement-on-greece-first-thoughts/

[4] http://russeurope.hypotheses.org/4144